De "l'Etoile Rouge" à "l'Etoile d'Or" ou l'histoire de la paroisse et de la communauté russe des Abbesses.

Voici un document écrit en 1999 par un ancien paroissien de la Paroisse St Séraphim de Sarov. Celui-ci traite de la communauté russe des Abbesses et de sa Paroisse. (Albocicade). En accord avec son auteur, celui-ci a été quelque peu actualisé et remanié avec des photographies choisies.

Ce document, même s'il traite en partie de faits déjà traités dans d'autres articles, se lit avec un plaisir rare. Il comporte notamment une présentation de la structure de la société russe avant la révolution bolchévique et une description précise de Saint Séraphim de Sarov et du culte qui lui ai voué.

De "l'étoile rouge" à "l'Etoile d'Or"

Préambule

Nous sommes en banlieue Est de Paris, à la limite de la Seine et Marne, et de la Seine St Denis. Au bout de la rue Albert Caillou, à l'angle de l'avenue Clovis et de l'avenue de l'Etoile d'Or, sur les communes de Chelles et Gagny, une petite église.

Mais est-ce bien une église, cette petite maison dans son enclos ?

Certes, elle est bien surmontée d'une croix, mais d'une croix étrange, une sorte de Croix de Lorraine, complétée encore d'une branche diagonale sur le pied.

L'église Orthodoxe en 2008.

Entrons.

Passées les trois marches et la porte, l'étonnement continue.

L'intérieur de l'église Orthodoxe en 2008.

De grands personnages peints nous attendent, entourés de porte-cierges, surmontés de cette même croix. Au fond, à droite d'une porte à claire voie, on le reconnaît ; c'est le Christ. Un peu plus avant, à gauche, certainement Marie. Mais les autres ?

Leurs noms sont indiqués, à côté d'eux, mais ces indications n'aident pas à grand chose. Qui peut donc écrire dans ces caractères inconnus ?

Nous sommes dans l'église St Séraphim de Sarov, une paroisse orthodoxe, fondée en 1933 par des Russes ayant dû abandonner leur pays, leurs terres, leurs biens dans la tourmente de la révolution bolchevique.

1) Russie, société et église

-a- La société pré-révolutionnaire

La société russe pré-révolutionnaire vivait à deux rythmes distincts : le rythme de la terre dans les campagnes et les classes "laborieuses"; et celui de l'Occident (France, Allemagne...) dans les villes, chez les "nantis".

Ces différences de rythme, corollaires d'une différence de niveau social, s'effacent lorsqu'il est question du Tsar Nicolas Alexandrovitch Romanov.

Le Tsar est la Russie, la terre russe, ingrate et prodigue, mais indispensable, inamovible. Il y a un Tsar depuis 1547 en Russie, depuis le sacre d'Ivan "Le Terrible"; mais surtout, il y a des Romanov sur le siège impérial depuis 1613 ! Autant dire depuis toujours...

On peut ne pas être content du Tsar, comme on peut n'être pas content d'une récolte, mais seuls quelques rares agités envisagent une destitution. Ces agités sont alors exilés dans des conditions que dénoncent alors les Communistes d'Europe de l'Ouest, mais qu'envieront ceux que les successeurs du Tsar, les bolcheviks, exileront.

Oui, le Tsar est une "Institution" dans la Russie d'avant la révolution, la première, mais il n'est pas la seule.

Le tsar Nicolas II en 1898

Cliquer pour agrandir :

Le Tsar Nicolas II Photographie en couleur du Tsar Nicolas II

L'armée en est une autre. En plus de l'armée de métier, cantonnée dans les villes, elle comporte des réserves immenses : les Cosaques, ces soldats-paysans installés sur les frontières de l'Empire, et prêts à être mobilisés à la moindre alerte.

Photo de cosaque N°1

Etre officier, voire même soldat, dans l'armée du Tsar, dans l'Armée Blanche, est autre chose qu'un métier; c'est une vocation. L'officier prête serment à son Tsar, et ce serment le lie à vie.

La défense de la terre russe, du Tsar, est une question d'honneur. Et on pourra rencontrer, bien des décennies après la révolution, bien après la défaite de l'Armée Blanche, des hommes pour répliquer, lorsqu'on leur demandera s'ils étaient officier du Tsar : "Je n'ai jamais été dégradé, que je sache ! Il ne faut pas dire que j'étais officier, je suis officier de l'Armée Blanche."

Enfin, dernière des grandes "institutions" russes, mais non la moindre : l'Eglise. L'Eglise russe, avec ses prêtres plus ou moins instruits, plus ou moins bons, l'Eglise est composante de la vie. Et même si "le moujik (paysan) ne fera pas son signe de croix, à moins que le tonnerre ne gronde", la vie est rythmée par de nombreuses fêtes religieuses, dont la plus importante, "la Fête des fêtes", Pâque, rassemble toute la population. La terre de Russie, qui a tant de fois été "illuminée" par des saints, fourmille de lieux de pèlerinages qui ne sont jamais désertés. Mais si un Empereur ou une armée sont des choses connues chez nous ; il convient de parler plus avant de cette Eglise russe.

-b- L'Eglise russe ; une église "orthodoxe".

L'Eglise majoritaire en Russie est une Eglise orthodoxe. Mais qu'est-ce à dire ? Avec le Catholicisme romain et les Eglises issues de la Réforme, l'Orthodoxie, est l'une des trois expressions majeures du christianisme historique.

Fondée sur une confession de foi trinitaire, et sur l'affirmation de la résurrection du Christ, l'Orthodoxie est structurée en "Patriarcats" indépendants les uns des autres, mais en communion les uns avec les autres.

Même si Rome conserve en théorie une primauté d'honneur ; en pratique, depuis les regrettables événements de 1054 (dans un contexte très politisé où les différences culturelles servirent de levier à l'incompréhension mutuelle, le Pape Léon IX excommunia -par légat interposé- le Patriarche de Constantinople Michel Cérulaire, qui excommunia le Pape en retour), le Patriarche de Constantinople est, de fait, le "Premier parmi ses Egaux". Et quoique les anathèmes de 1054 aient été levés par le Pape Paul VI et le Patriarche de Constantinople Athénagoras en 1965, la communion n'a pas été rétablie entre Rome et les Eglises orthodoxes (sauf dans quelques situations particulières).

Née en 988, par la conversion du Prince Vladimir de Kiev, l'Eglise russe commence par être dans la dépendance de Constantinople, puis devient un patriarcat en 1589. En 1721, le Tsar Pierre le Grand, dans une farouche volonté d'autocratie, remplacera le patriarcat par un Saint Synode, sous la présidence d'un procureur impérial. Il faudra attendre le Concile de Moscou en 1917 pour que soit rétabli le patriarcat de Moscou, avec à sa tête un patriarche, Tikhon, indépendant du pouvoir politique.

Cette indépendance politique théorique sera bien peu respectée par le gouvernement soviétique qui arrêtera le patriarche en 1922, puis exigera de son successeur, le patriarche Serge, des déclarations publiques, au nom de l'Eglise, de loyauté au régime instauré par les bolcheviks. Une telle situation devait amener les Russes en exil à rechercher une "identité canonique" que certains trouvèrent en demandant un rattachement au Patriarcat de Constantinople, d'autres en créant une Eglise Russe Hors-Frontières, d'autre enfin en maintenant envers et contre tout une fidélité au patriarcat de Moscou, considéré comme otage du régime politique.

En effet, les bolcheviks, tout en affirmant "la stricte séparation de l'Eglise et de l'Etat" avaient pour objectif, selon le mot de Lénine, de supprimer "les vieux préjugés pourris" de la religion. Objectif poursuivi, selon les périodes soit par la publication par l'Académie des sciences de l'URSS d'ouvrages visant à "dissiper, à la lumière de la science, le mythe de l'origine divine du christianisme", soit par la fondation de musées antireligieux, soigneusement visités par les écoles, soit encore par des brimades, des vexations, des emprisonnements arbitraires, des tortures... des exécutions de croyants au seul motif qu'ils étaient croyants.

Un dernier mot pour caractériser l'Orthodoxie : la richesse, la charge de ses liturgies avec ses icônes, ses choeurs, son encens, la longueur de ses offices est bien souvent ce qui frappe le plus au premier abord. Cependant, cet aspect immédiatement perceptible de la spécificité orthodoxe ne doit pas nous masquer une autre richesse, de laquelle toutes les églises chrétiennes sont redevables aux Métropoles orientales, regroupées maintenant dans les patriarcats orthodoxes : la richesse spirituelle et théologique, et particulièrement les 7 "Conciles Oecuméniques" durant lesquels ont été formulé de manière élaborée les dogmes fondamentaux de la foi chrétienne.

2) La "Russie en exil"

-a- Révolution

Dès 1914, l'empire russe s'engage dans ce que l'on appellera la "Grande Guerre", pour soutenir ses alliés, la Serbie, mais aussi la France et la Grande Bretagne. La mobilisation générale décrétée par l'oukase du 30 Juillet va lancer l'Empire et le tsar dans une guerre dont ni l'un ni l'autre ne se relèveront.

Corps Expéditionnaire Russe en France 1916-1918

Le tsar Nicolas II est un "bon prince" plutôt qu'un grand homme. Un homme doux et bon, mais dénué du génie visionnaire qui lui aurait permis, en modernisant les institutions plus qu'il ne l'avait fait en 1905, de faire franchir à son pays le tournant qu'a constitué le passage au XX° siècle. Héritier du système autocratique de Pierre le Grand, il est loin du peuple, mais ne s'en rend pas vraiment compte. Il aime son peuple, mais ne prend pas la mesure des injustices que ce système légitime, voire génère.

D'autre part, un antisémitisme de base, parfois alimenté par l'église, sévit dans la plupart des régions. Pogroms, vexations, pillages se multiplient, et le Tsar, qui pourtant ne partage pas cet antisémitisme, ne réprime pas suffisamment les fauteurs de troubles. Ce climat d'insécurité pour les juifs, dont le Tsar est tenu pour responsable, sera un des terreaux sur lesquels s'alimenteront les révolutionnaires.

Contesté par une faible marge, il ne sévit pas, mais se limite à exiler les opposants. Pris dans l'engrenage de la guerre qui épuise son pays, il reste jusqu'au bout fidèle, loyal à ses alliés.

Le peuple souffre, mais ne conteste pas. Peut on se révolter contre le Tsar ? Ni le peuple, ni le Tsar ne le croient. Les Journées de Mars 1917, aboutissant à la Révolution d'Octobre ont pris le Tsar au dépourvu. L'épuisement, la lassitude et la grogne de l'armée au Front et des familles à l'intérieur servirent de tremplin pour la poignée de révolutionnaires décidés à renverser le régime.

Révolution d'octobre : La prise du palais d'hiver

Le tsar a abdiqué en Mars 1917. N'ayant pu se réfugier chez ses anciens alliés (France, Angleterre) auxquels il est pourtant resté loyal à tout prix, il est arrêté avec sa famille, déporté, puis finalement, "exécuté" avec les siens en Août 1918.

La famille royale en 1911

Dès Mars 1919, au premier congrès de l'Internationale Communiste, à Moscou ; "l'Etoile rouge du Kremlin est devenue l'espoir, le repère des partis communistes du monde entier". La lutte entre les armées des "Blanc" (tsaristes) et celles des "Rouges" (bolcheviks), après de nombreux retournements de situation s'achève sur une large défaite des Blancs.

La révolution russe de 1917

Pour de nombreux russes, en premier lieu les militaires qui, ayant prêté serment au Tsar ne veulent pas se déjuger, mais aussi tous les opposants au régime que veulent instaurer les bolcheviks, il ne reste plus d'autre solution que l'exil...

-b- Emigration

Le nouveau régime de Moscou, avec son "Tsar rouge", Lénine, proclame hautement son "internationalisme". Il n'y a plus de Russie, seulement une nation gouvernée par des bolcheviks, qui attend de s'allier avec d'autres nations, jusqu'à ce que les bolcheviks dominent le monde ; c'est le rêve de la Grande Internationale.

Lénine

Il n'y a plus de Russie ; les bolcheviks au pouvoir ne se disent plus "russes". Alors, ceux qui fuient ce "paradis des prolétaires" emportent avec eux, en eux, cette Russie qu'ils aiment, qu'ils chérissent, qu'ils espèrent bien retrouver... bientôt. Ce ne sont donc pas des russes qui partent, c'est la Russie qui s'exile, qui quitte sa terre, qui s'emmène tout entière dans ses exilés. Vers Constantinople, Belgrade, Londres, New York, Paris, ils partent dans l'espoir de revenir. Puis le temps passe. Ce qui a pu être sauvé au moment de la débâcle ne suffit qu'un temps pour subsister. Il faut s'organiser, trouver un emploi, même subalterne, même mal payé. Et ces anciens nobles, anciens diplomates, anciens soldats de l'Armée Blanche, anciens commerçants, anciens propriétaires... s'ingénient à trouver des emplois, s'ingénie à imaginer l'avenir dans la Russie retrouvée, et continuent à se disputer pour des idées politiques (certains tentèrent même de créer une "Assemblée Constituante Russe" à Paris, en 1920), tout en se secourant, quand cela est possible.

Les conditions de vie sont précaires ; beaucoup -sur Paris- habitent en hôtel, sans confort, sans sécurité... sans possibilité d'avenir non plus. Aussi, même si les plus chanceux parviennent à s'établir vraiment sur Paris (le XV° arrondissement devient une petite "colonie" russe), faut-il chercher plus loin, en banlieue des solutions plus durables. Des secteurs comme Boulogne-Billancourt, Montrouge, Asnières deviennent alors des lieux de regroupement pour ceux qui parviennent à acquérir un lopin de terre, et y bâtir une modeste habitation.

-c- Les Russes à Chelles

En 1926, il est question de mettre en lotissement à bâtir tout le secteur boisé et marécageux de l'Ouest de Chelles connu sous le nom de quartier des Abbesses. Parmi les personnes chargées du lotissement se trouve un russe, M Glinka, qui fait courir l'information parmi ses compagnons d'exil.

Dimitri Plechakoff est le premier à s'installer ; beaucoup d'autres suivent, rapidement. Plus de la moitié d'entre eux sont des Cosaques, de la région du Kouban, au Sud de la Russie. Ils étaient, comme dit précédemment, ces "paysans-soldats", mobilisés dans l'armée Blanche, entraînés dans la débâcle. Pour eux, retrouver une terre, c'est déjà un peu revivre.

Ils travaillent sur Paris ou les environs la semaine, et le dimanche, ils viennent construire leur maison. Dès 1930, il y a au moins 40 familles installées sur le quartier. Une petite communauté russe naît ainsi à l'Est de Paris.

Cette communauté continuera pendant des années à s'étoffer, sur les communes de Chelles et de Gagny. En 1939 est fondée, à Chelles, une maison de retraite pour les Russes, puis, en 1954 une autre à Gagny.

3) La paroisse St Séraphim de Sarov

-a- Les Russes s'organisent

S'ils n'ont plus ni Tsar ni armée, les Russes de Chelles restent avant tout des Russes : ils auront une église. Cette église servira de centre névralgique pour l'ensemble de la communauté du secteur. En effet, être Russe, c'est être orthodoxe (la "preuve" en est que les bolcheviks qui se disent athées ne se disent plus Russes !). Le colonel de l'ex-Armée Blanche, Tchistiakoff, devenu architecte, fait construire un immeuble, avenue Sambre et Meuse, pour le compte de la famille Migraboff.

L'immeuble Migraboff

C'est dans une dépendance de cet immeuble que sont célébrés les premiers offices religieux. C'est la naissance d'une paroisse qui peu à peu s'étoffera.

A Pâques 1933 (rappelons que Pâques est "la Fête des fêtes", le point culminant de la vie religieuse orthodoxe), est constituée l'association cultuelle (loi 1905) St Seraphim de Sarov, avec le projet de bâtir une église sur un terrain adjacent.

L'église Saint Séraphim : Visite de l'évêque 1934

L'école du jeudi de la paroisse débute en Octobre 1933, avec au programme : catéchisme, mais aussi apprentissage de la langue russe, de l'histoire et de la géographie de la Russie. Les enfants iront même, pour Noël, de maison en maison chanter des chants traditionnels pour récolter des fonds pour l'école. La paroisse organisera aussi un arbre de Noël pour les enfants.

Le catéchisme du Jeudi, 1938.

Ce projet d'église resserre les liens. Tout le monde participe à l'édification de cette église, selon ses moyens, ses capacités : les plus aisés achetant les matériaux, les autres maniant la pelle ou la truelle, et le 1° novembre 1933, sous la présidence de l'archevêque Seraphim de l'Eglise Russe Hors Frontière, c'est l'inauguration.

L'égliste orthodoxe dans les années 30

Une église dans le plus pur style russe, avec ses trois coupoles, ses icônes, ses cierges... Une église située avenue Sambre et Meuse à Chelles, Seine et Marne ; dédiée à St Seraphim de Sarov.

L'égliste orthodoxe dans les années 30

-b- Séraphim de Sarov, un saint russe... en France

Mais qui est ce saint qui a été élu "patron de ce sanctuaire" ? Avant tout, un "starets"(voir annexe 1).

Biographie

Né le 19 Juillet 1759, fils d'un briquetier entrepreneur en bâtiment de Koursk (500 Km au Sud de Moscou), Prokhore MOCHNINE (Прохор Мошнин) entre comme novice au monastère de Sarov (350 Km à l'Est de Moscou) à 19 ans, et reçoit, huit ans plus tard, avec son habit de moine, un nouveau nom : Séraphim (ce qui signifie "Flamboyant", en hébreu). Ordonné diacre, puis prêtre, il obtint de l' higoumène de son monastère, en 1890, la permission de se retirer en ermite, dans la forêt.

Icône de St Séraphim de Sarov

Il vécut ainsi, partageant sa vie entre son ermitage et le monastère de Sarov, une ascèse rigoureuse, faite de jeûne, de solitude d'humilité et de prière, avec comme objectif permanent de se "rapprocher du Christ". Ses lectures étaient la Bible (il lisait le Nouveau Testament en entier chaque semaine), ainsi que les écrits des Pères de l'Église.

Dans son immense désir de tout rapporter à Jésus, il avait donné aux environs de son ermitage des noms bibliques. A " Nazareth ", il chantait les hymnes " akathistes " à la Vierge ; récitait les offices de sexte et none au " Golgotha " ; lisait l'évangile de la Transfiguration au " Mont Thabor", et entonnait à " Bethléem " le " Gloire à Dieu au plus haut des cieux ".

Il vécut même, pendant un temps, la vie des stylites. Ainsi, durant mille jour et nuits, il passait des heures sur un rocher, à prier. Cependant, comme lui-même le faisait remarquait à un novice qui l'en louait, en comparaison de Syméon l'Ancien, c'était peu de temps.

Un événement, qui failli lui coûter la vie, illustre bien le caractère du "misérable Séraphim" (ainsi qu'il se définissait lui-même) :

En Septembre 1804, il fut agressé à son ermitage par trois "brigands" (des paysans d'un village voisin) qui voulaient le voler (lui qui ne possédait rien !). N'ayant rien trouvé, ils le battirent et le laissèrent pour mort, avec une fracture du crâne, et plusieurs côtes cassées.

Plus tard, les "brigands" ayant été retrouvés, le père Séraphim qui avait été ramené au monastère s'opposa formellement à ce qu'ils soient châtiés : il avait pardonné.

Néanmoins, après cet incident, son higoumène ne l'autorisa plus à retourner à son ermitage, et c'est dans le monastère de Sarov qu'il vécut les années suivante. Même s'il recevait parfois quelques visites, comme tout moine et tout ermite, ce n'est qu'à partir de 1822 (il avait alors 63 ans) que sa renommée se répandit. Il fut alors continuellement assailli de visiteurs : fermière du voisinage, militaire, moine, pèlerin, prince, prêtre, femme du monde, haut dignitaire de l'église, commerçant, tous venaient, par centaines, et se pressaient autour de lui, pour le questionner, pour l'entendre, pour le voir.

Et que voyaient-ils ? Un petit vieux, "tout blanc, tout ratatiné, tout sec" aux yeux bleus et au sourire "incompréhensiblement radieux". Un petit vieux qui recevait chaque visiteur par ces mots "Bonjour, ma joie", et encore "Christ est ressuscité !"

Et son accueil, sa sagesse, sa "clairvoyance" (n'accueillait-il pas certaines personnes par ces mots : "je sais, je sais", les faisant passer devant tout le monde, leur prodiguant conseils et consolation avant même qu'ils aient dit qui ils étaient ou pourquoi ils venaient ?) apportait encouragement, relèvement à tous ces visiteurs parfois un peu trop pressants.

Cependant, son don de préconnaissance et ses conseils n'étaient pas les seules causes de la popularité du Père Séraphim : beaucoup de malades venaient le voir et obtenaient par ses prières des guérisons dont les plus spectaculaires furent celles de Michel Mantourov (qui permit plus tard la création du couvent féminin de Divéyévo), et de Nicolas Motovilov (avec qui il eut un long entretien qui est considéré comme un des sommets de la spiritualité orthodoxe).

Malgré les tracasseries que lui infligeait parfois sa hiérarchie (avait on déjà vu un moine aussi "indiscipliné" ?), il put fonder une communauté monastique de femmes à Divéyévo, à quelques kilomètres du monastère de Sarov.

Dans la nuit du 1° au 2 Janvier 1833, quoique l'on fut dans le "temps de Noël", on l'entendit chanter les hymnes de Pâques, notamment le tropaire de la résurrection.

Ce furent ses dernières paroles. Il fut trouvé au petit matin dans sa cellule, agenouillé devant une icône de la Theotokos comme en prière, mort.

Canonisation

Le 19 Juillet 1903, 70 ans après sa mort, prenant acte de la vénération dont le Starets Séraphim était l'objet, "persuadé de l'authenticité des miracles attribués aux prières du starets Séraphim, et rendant grâce à Dieu glorifié dans ses saints" le Saint Synode procéda à sa canonisation.

En présence du Tsar Nicolas II, d'un clergé abondant et d'une foule immense eut lieu l'office de canonisation au cours duquel on chanta le tropaire composé en l'honneur du "nouveau saint". Durant la nuit qui suivit, la foule resta sur place, à prier, puis, contrairement à l'usage, les hymnes de Pâques furent entonnés.

Canonisation de Saint Séraphim en 1903. Cliquer pour agrandir :

Canonisation de Sarov en 1903. Canonisation de Sarov en 1903. Les pélerins pendant la canonisation de Sarov en 1903.

Photographies de la canonisation de Saint Séraphim en 1903 (Source des images : http://photo.orthodoxy.ru).

Il devint un des saints les plus populaires de l'église russe.

Il est fêté le 2 Janvier, ainsi que le 19 Juillet.

Plusieurs paroisses de l'émigration russe se sont placées sous le patronage de St Seraphim. Ainsi y en a-t-il, en France, une à Paris et celle de la Paroisse Orthodoxe de Gagny-Chelles.

Sa spiritualité

La spiritualité de Séraphim, très ancrée dans la Bible et la tradition orthodoxe (en particulier la Philocalie) s'exprime en particulier dans son "Entretien avec Motovilov" ainsi que dans les "Instructions spirituelles" qui ont été rassemblées par les moniales de Divéyevo.

Sa vision prophétique

Homme de prière, profondément spirituel, le père Seraphim voyait "au-delà des apparences". Il est à ce titre (et à d'autres) à rapprocher de son contemporain français, le prêtre catholique Jean-Marie Vianney. Outre de nombreuses paroles "personnelles" qu'il prodigua à ses innombrables visiteurs, on rapporte qu'il annonça des temps de trouble survenant après une grande joie("En plein été, on chantera Pâques", mais " cette joie sera de courte durée ", "La vie sera courte, alors, les anges auront à peine le temps de ramasser les âmes...") que l'on n'eut aucun mal à identifier avec la Révolution russe survenant quelques années après la canonisation de St Seraphim.

C'est ce saint, ce Russe "tout en Dieu" que la paroisse de Gagny-Chelles avait choisi comme "patron", symbole de son identité russe et de son appartenance à Dieu.

-C De Sambre et Meuse à Etoile d'Or

La communauté russe de Chelles-Gagny est bien en place, les chemins empierrés, deviennent de "vraies" rues. On compte une soixantaine de familles russes sur le quartier, et, comme dans toute minorité, il se forme des clans, des rivalités... mais la paroisse reste un lieu d'unité.

En 1939, la propriétaire du terrain sur lequel est construite l'église réclame, au lieu du franc symbolique jusque là demandé, un loyer de 500 francs par an, ou un rachat du terrain pour une valeur de 12 000 francs. Après délibération du Conseil d'Administration, et contre-proposition de rachat pour 8 000 francs (refusée), il est décidé de transférer l'église deux rue plus loin, sur un terrain appartenant en propre à la paroisse.

Brique par brique, la petite église est démontée, puis transportée et remontée au 23 avenue de l'Etoile d'or. Les travaux sont réalisés par les paroissiens auxquels il est demandé une contribution en journées de travail ou, à défaut, une participation financière par jour de travaux.

L'église Saint Séraphim lors de son déménagement en 1939

Ce terrain de 271 m2, coupé par la limite départementale entre la Seine et Marne et la Seine et Oise (devenue Seine St Denis) aura coûté moins de 6000 francs à l'achat. Pour limiter les droits administratifs lors des obsèques, une seconde porte est ouverte dans l'église : la porte principale est en Seine et Oise, l'annexe en Seine et Marne.

Puis vient la seconde guerre mondiale, l'après guerre. En Russie - excusez-moi, en Union Soviétique - Staline, "cachant son bon sourire dans ses moustaches paternelles" annonce la réouverture des églises.

Staline

A Paris, même le métropolite Euloge, pourtant très nettement opposé à toute forme de compromission ou de récupération par le gouvernement soviétique se fait l'écho de la nouvelle. La nouvelle surprend, et sera longuement commentée dans les milieux russes. Ce n'est pas possible, l'Union Soviétique est toujours gouvernée par les bolcheviks athées ! Oui, mais s'ils ont changé... alors... Ici, c'est l'exil, là bas, la terre des ancêtres. Peut-on faire confiance aux soviétiques ? Mais c'est vrai que l'Union Soviétique a gagné la guerre... Quelques paroissiens, relativement peu cependant, partent retrouver leur Patrie. Confrontés à la lourdeur et la prégnance d'un athéisme d'Etat, à une reprise des persécutions, à une surveillance quasi permanente et à une méfiance de tous les instants, il leur fallut déchanter : rien de bon n'est à attendre de ce régime... La question de l'identité canonique de la paroisse se posa de nouveau : si le patriarcat de Moscou est un jouet aux mains du despote, vers qui se tourner ? C'est au patriarcat de Constantinople, autorité ecclésiale neutre et, traditionnellement pasteur des communautés dispersé que se rattache la paroisse.

Café Marek : Visite de l'évêque fin des années 50

Photo de la visite de l'évêque Méthode au quartier des Abbesses à la fin des années 50 :
  • à droite il y a l'évêque auxiliaire de l'Eglise Orthodoxe Russe en Europe Occidentale.
  • au centre, avec la croix, P. Nicolas Ivanoff, recteur de la paroisse missionnaire à la maison de retraite russe du Prompt Secours (Aujourd'hui la Cerisaie à Gagny).
  • à Gauche Mme Petrankhoff.

Les années passent, avec des décès, le départ des enfants... et peu à peu, les Russes s'intègrent, la communauté s'amenuise. Les immigrants étaient Russes, "donc" orthodoxes. Peu à peu, le visage de la paroisse évolue, en même temps que se vit, dans la diaspora orthodoxe un renouveau théologique initié par la création, en 1926, de l'Institut de Théologie Orthodoxe St Serge à Paris : on peut être orthodoxe sans être Russe (ou Grec...).

La création en 1967 d'un "Comité Inter-épiscopal Orthodoxe", devenu en 1996 "Assemblée des Evêques Orthodoxes de France" manifesta la communion existant entre les différents patriarcats, et allait dans ce sens d'une orthodoxie non nécessairement liée aux nations ou aux langues d'origines : même rattachés canoniquement à des patriarcats à l'étranger, ces orthodoxes sont en France.

L'offrande du pain bénit, 1978. L'offrande du pain bénit, 1978.

Cette approche renouvelée du sens de la paroisse amènera quelques changements significatifs. Ainsi, dans la liturgie qui, jusqu'alors était en slavon (langue liturgique ancêtre du russe, équivalent à notre latin), certaines parties sont dites aussi en français, puis uniquement en français. Ceci permettra une ouverture de la paroisse sur la vie religieuse locale, ainsi que la possibilité, pour des prêtres non-slavophones (souvent des étudiants à l'institut St Serge) de célébrer. (Parmi ces "prêtres de passage", qui étaient là pour quelques mois, deux sont devenus évêques, dont un sous le nom de... Séraphim). De même, en 1983, la paroisse intègre une sainte locale du VII° siècle, la reine Bathilde de Chelles.

4) 64 ans après...

Aujourd'hui, en 2008, l'église a perdu ses bulbes lorsqu'il fallut refaire le toit, mais s'est enrichie d'une icône représentant, par les saints dont ils portaient les noms, tous les fondateurs de la paroisse. Le Père Georges Bellières, français de souche, en est le prêtre. Il est Prêtre de la Métropole roumaine d’Europe Occidentale et méridionale.

Fêtes de Pâques, 26 avril 2008. Fêtes de Pâques du 26 Avril 2008.

Compte tenu du petit nombre de paroissiens réguliers (car pour Pâques, l'église est toujours trop petite), les offices sont généralement espacés de deux semaines, avec célébration des vigiles le samedi soir, et de la "divine liturgie" le dimanche matin. Cependant, après une période de forte baisse de fréquentation, l'église St Séraphim connaît un léger accroissement du nombre de ses membres, tant par l'arrivée de nouveaux immigrants Russes, que par l'entrée dans l'église de Français de souche. La paroisse participe activement aux "semaines de l'unité des chrétiens", et un certain nombre de paroissiens sont des membres du cercle d'études bibliques oecuménique de Chelles.

Mais l'identité russe n'a pas pour autant disparue. En effet, il peut arriver, exceptionnellement, que la liturgie soit célébrée en partie en slavon, lorsque, le Père Jean Marie absent, il est remplacé par un prêtre slavophone. D'autre part, le contact est maintenu avec la "communauté russe" en France, notamment par le biais de l'ACER (Action Chrétienne des Etudiants Russes), de La Voix de l'Orthodoxie (station de radio qui produit des émissions à caractère religieux en russe, captées de Rostov à Vladivostok), de la "Pensée Russe" (journal d'expression russe, né de l'émigration, orienté politiquement pour la défense des valeurs de la démocratie, avec des soubassements chrétiens).

Icône de la mère de dieu Icône de la Mère de Dieu de la Paroisse.

Depuis la chute du "Bloc de l'Est", de nouveaux contacts ont même pu se nouer. Ainsi, plusieurs paroisses de la région parisienne (dont la paroisse St Seraphim de Sarov), en lien avec la "Voix de l'Orthodoxie", apportent un soutien à la "Fraternité Sainte Anastasia" à St Petersbourg. Cette association caritative se consacre à l'aide aux détenus, aux malades, aux handicapés, aux isolés, ainsi qu'aux "enfants des rues" qui sont de plus en plus nombreux.

Toujours dans le champ social, mais en lien avec la notion d'une Orthodoxie en France (et non plus dans le strict cadre de l'Orthodoxie Russe), se constitue un projet de réseau orthodoxe avec deux objectifs majeurs : mettre en lien des orthodoxes agissant dans le champ social au sens large du terme (ce qui englobe aussi bien des travailleurs sociaux que des professionnels de la santé ou des bénévoles d'oeuvres à caractère caritatif) pour l'éventualité de création de projets communs d'une part, et d'autre part servir de lieux ressource pour faire face aux problèmes spécifiques posés par la nouvelle émigration en provenance de l'ex-Bloc de l'Est. En effet, il n'est, actuellement, pas toujours aisé de trouver un médecin comprenant le slovène, ou un travailleur social parlant roumain. Plusieurs membres de la paroisse St Séraphim de Sarov sont d'ores et déjà engagés dans ce projet qui est à l'état... embryonnaire.

Ainsi une petite église, qui a su, au fil des années, s'intégrer dans un contexte imprévu... tout en gardant la spécificité de ses origines.

Annexe 1

Quelques types particuliers d'orthodoxes russes. La Russie orthodoxe a vu se développer, outre les moines, prêtres, ermites et simples laïcs de paroisse ; des formes spécifiques de piétés qui, même si elles se retrouvent aussi sous d'autres cieux, ont été portées ici à leur plus forte expression. Tout d'abord, parce qu'il concerne directement notre étude, présentons le "Starets" :

  • Tous ceux qui ont lu "Les frères Karamazov", de Dostoïevski ont en mémoire la figure du "starets Zossime", et ont par là même une idée de ce qu'est un starets.

Le starets est un "ancien", un "père spirituel". Son rôle est de vivre une expérience spirituelle telle que les autres sentent en lui la présence de Dieu. On vient le voir pour lui demander un conseil, une direction, une bénédiction. Généralement moine, il est reconnu à l'intérieur du monastère (malgré parfois quelques oppositions tenaces), mais sa renommée draine rapidement de nombreux laïcs. Bien souvent, le starets est authentifié par le don des miracles, de guérison, voire de préconnaissance, de "clairvoyance" : sans que le visiteur ait eu le temps de se présenter ou de dire ce qui l'amène, le starets lui donne, en quelques mots simples la direction ou la consolation espérée. Mais le Staretsevo (fait d'être un starets) n'est pas l'unique manifestation spécifique de la piété russe : on rencontre aussi le "pèlerin", le "fol en Christ" et le "poustinik"

  • Le pèlerin consacre sa vie à visiter les lieux de pèlerinages, les monastères.

Un proverbe russe l'affirme : "en chaque Russe, sommeille un pèlerin". Même si l'affirmation est excessive, ils étaient tout de même nombreux à aller de lieux saints en monastères, suivant Dieu "à la trace". Pour vivre, le pèlerin se loue comme journalier, comme tâcheron pour des périodes assez courtes, puis reprend sa route, tout en priant. Il lui arrive de vivre de l'aumône qui lui est faite, mais sait lui-même pratiquer la charité.

  • Le "fol en Christ" est tout différent du pèlerin : il ne se "contente" pas d'une vie dépouillée, toute consacrée à la prière et à la charité, il veut aller plus loin, dans une sorte d'identification au Christ incompris. Constatant que le "monde chrétien" dans lequel ils vivaient n'était chrétien qu'en apparence, certains ont délibérément choisi de vivre de manière totalement décalée, mais toujours animé -même lorsque cela n'apparaissait pas au premier regard- par une volonté farouche de fidélité aux exigences de l'évangile. Tournés en dérision, pris pour des fous, ils persévéraient dans leur voie, celle du Christ moqué par les arrogants, les "pharisiens", mais reconnu par les humbles. Cette persévérance, accompagnée de dons de connaissance, de miracles est la pierre de touche de l'authenticité de la vocation céleste du "fou" ou de la "folle". Ne devient pas "fol en Christ" qui veut !
  • Le "poustinik" est quant à lui plus "sociable". Du moins, dans une certaine mesure.

Un homme, une femme quitte la société des hommes, et se retire, solitaire. Une vie d'ermite commence, qui peut durer plusieurs années, toute une vie. L'ermite vit devant Dieu, prie pour l'humanité qu'il ne côtoie plus physiquement, regarde Dieu, et parle des hommes à Dieu. Puis, un jour, jamais peut-être, il quitte son ermitage. Alors, plusieurs voies s'ouvrent à lui : il peut reprendre une vie sociale classique, il peut devenir pèlerin, moine ou encore... "poustinik". Le poustinik, à la différence de l'ermite, ne se cache pas. Il s'est rapproché d'un village, d'une ville, et continue sa vie d'ermite, tout en étant "a la disposition" des habitants de la région. Tout en continuant à "parler des hommes à Dieu" (prier), il est maintenant prêt à "parler de Dieu aux hommes". Mais s'il est souvent un conseil spirituel, un appui, il est aussi une présence. Manque-t-on des bras pour rentrer le foin alors que l'orage gronde ? Voila le poustinik qui arrive d'on ne sait où et qui prend une fourche. Un enfant est-il malade en pleine nuit sans que personne ne puisse prévenir le médecin ? Le poustinik passe "par hasard", et se charge de la commission...

Annexe 2

La liturgie, pilier de la vie orthodoxe L'ensemble des églises orthodoxes a en commun, en plus de la foi et de ses définitions, une liturgie aussi riche que structurée : la liturgie byzantine ou "Divine Liturgie" de St Jean Chrysostome. (La liturgie de St Basile, commune aussi à toute l'Orthodoxie est utilisée pour le Grand Carême, et à quelques occasions spécifiques) Dans le déroulement de la Divine liturgie proprement dite (Préparation, Liturgie des Catéchumènes, Liturgie Eucharistique) viennent donc s'intercaler, outre les lectures bibliques (l'Ancien Testament et l'Apôtre étant confié à un lecteur, l'Evangile étant lu par le prêtre), diverses pièces spécifiques à l'office du jour. L'office étant chanté par un choeur, sans aucun accompagnement instrumental, la liturgie comporte une riche hymnographie basée essentiellement sur des poésies religieuses byzantines, donc des textes, écrits en grecs entre le VII° et le X° siècle: ce sont les "canons", les hymnes acathistes, les prokiménons, les tropaires et kondaks. Les "Canons" ont étés composés pour certaines fêtes. Ils comprennent huit "Odes", chacune composée d'un "Hirmos" (cantique) et d'un ou plusieurs refrains. Certains de ces refrains sont utilisés comme "Tropaires". Les hymnes "Acathistes", sont des actions de grâce au Christ ou à la Mère de Dieu (la Vierge Marie est ainsi appelée chez les orthodoxes, pour souligner l'unité, dans le Christ, de l'humanité et de la divinité). Les "Prokiménons"sont des versets de psaumes antiphonés, intercalés entre la lecture de l'Apôtre et celle de l'Evangile. Enfin, les "Tropaires" contiennent le thème principal du jour, tandis que les "Kondaks"sont des hymnes contenant le deuxième thème du jour. Ces textes liturgiques furent traduits du grec dans les diverses langues liturgiques employées. Bien évidemment, d'autres compositions se sont ajoutées au fil des siècles, en d'autres langues que le grec. Ainsi en est-il des tropaires et kondaks à St Séraphim de Sarov, qui furent composés directement en slavon. L'ensemble de ces textes est maintenant traduit en français.

La résurrection du Christ étant au coeur de la foi orthodoxe, le "Tropaire de la Résurrection", présenté ci après, est chanté par toute l'assemblée (en français et en slavon, à Chelles) plusieurs dizaines de fois au cours de l'office de Pâques, dans la nuit du Samedi Saint au Dimanche de Pâques, ainsi qu'à diverses occasions durant l'année.

Le Christ est ressuscité d'entre les morts

Par la mort, Il a vaincu la mort ;

A ceux qui sont dans les tombeaux

Il a donné la vie.

Icône de la résurrection de la paroisse St Séraphim de Sarov Icône de la résurrection de la paroisse St Séraphim de Sarov

Le tropaire et le kondak de St Séraphim de Sarov sont chantés à l'occasion de la fête du saint, ainsi qu'à certaines occasions, à la fin de la liturgie eucharistique.

Tropaire de St Séraphim de Sarov :

Tu as aimé le Christ dès ta jeunesse

Et tu fus enflammé du désir de le servir, Lui seul,

Tu as vécu dans la solitude

T'adonnant au travail et à la prière incessante.

Par ta tendresse et ta douceur,

tu as acquis l'amour du Christ,

Et tu as été l'élu de la Mère de Dieu.

Par tes prières conduis-nous au salut

Bienheureux Père Séraphim

Kondak de St Séraphim de Sarov :

Ayant renoncé aux attraits du monde,

Et à ce qui est périssable en lui

Tu as choisi la demeure de Sarov

Et tu y as vécu pareil à un ange.

Pour beaucoup tu fus la voie du salut ;

Aussi, le Christ t'a glorifié, ô Père Séraphim,

T'accordant les dons du miracle et de la guérison ;

C'est pourquoi nous te crions :

"Réjouis-toi bienheureux Père Séraphim !"

Bibliographie :

  • Clément O. : "L'église Orthodoxe"; PUF, Coll "Que Sais-je" n° 949
  • Clément O. : "Eglise Orthodoxe"; in Encyclopédie Universalis, 1995
  • De Hueck Doherty C. : "Poustinia"; le Cerf éd, 1980
  • Dunlop J. B. : "Le starets Ambroise d'Optino"; Abbaye de Bellefontaine, 1982
  • Fletcher W. : "L'église clandestine en Union Soviétique"; Alain Moreau éd., 1972
  • Goraïnoff I. : "Seraphim de Sarov"; DDB, coll Théophanie, 1979
  • Goraïnoff I. : "Les fols en Christ"; DDB éd, coll Théophanie, 1983
  • Gorboff M. : "La Russie fantôme"; L'Age d'Homme éd., 1995
  • Lenzman J. : "L'origine du Christianisme"; "Editions en langues étrangères", Moscou, 1961
  • Nickolsky A. : "Les Russes à Chelles"; in "Bulletin de la Société archéologique et historique de Chelles" n° 10, 1989-1990
  • Portal R. : "Révolution russe"; in Encyclopédie Universalis, 1995
  • Portal R. : "URSS et ex-URSS"; in Encyclopédie Universalis, 1995
  • Soljenitsyne A. : "L'archipel du Goulag"; Le seuil éd., 1974
  • N. Struve N. : "70 ans d'émigration russe"; Fayard éd. 1996
  • Collectifs
  • "Le Monde orthodoxe, pouvoir et nation" in Revue Géopolitique, n° 47, Automne 1994
  • "L'église Orthodoxe en France - annuaire 1992" SOP éd
  • "Le livre noir du communisme", Collectif, Robert Laffont éd., 1997
  • "La révolution russe", Collection "les grands dossiers de l'Illustration", Sefag éd, 1987
  • Anonymes
  • "La divine liturgie de St Jean Chrysostome", catéchèse orthodoxe, le Cerf éd., 1986
  • "Récits d'un pèlerin russe", trad J. Laloy, Le Seuil éd., coll Points Sagesses n°14, 1966
  • Articles "Romanov", "Séraphin de Sarov", "Staretz"; in Encyclopédie Universalis, 1995

Source : Albocicade 1999 - 2008