Article du Parisien en date du 19 Mai 2014 :
500 manifestants contre la carrière au fort de Vaujours
A l'appel de l'association Sauvons la Dhuis et d'EELV 93, 500 manifestants
ont réclamé l'arrêt des démolitions engagées par Placoplâtre.
« Casse-toi, placo ! », pouvait-on lire samedi
sur les pancartes des manifestants massés devant l'usine Placoplatre. Près de
500 personnes s'étaient donné rendez-vous pour demander l'arrêt du chantier de
démolition engagé par le géant du plâtre au fort de Vaujours. Ancien centre
d'expérimentation du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), le site, qui a
fermé en 1997 après quarante ans d'essais de détonique à l'uranium, montre une
radioactivité anormale dénoncée depuis 2001 par les associations locales et la
Criirad (Commission de recherche et d'information indépendantes sur la
radioactivité).

Propriétaire de 40 ha de ce site classifié pollué par le ministère de
l'Environnement et frappé d'une servitude d'utilité publique par la préfecture
depuis 2005, Placoplatre a déjà démoli quelque 26 bâtiments. Lundi dernier,
l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire a publié sur son site une
note d'information dans laquelle le protocole de démolition établi par Placo
est jugé « insuffisant ».
« Nous nous battons depuis des années pour que la pollution du site à
l'uranium, mais aussi à d'autres substances hautement toxiques, soit reconnue
par le CEA, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et Placo, a rappelé au micro
Christophe Nédelec, de l'association Sauvons la Dhuis. En 2011, nous avons
effectué nous-mêmes des mesures et, en deux heures et de nuit, nous avons
trouvé des points chauds radioactifs à plus de trente fois la norme ! Ce
qu'a fini par confirmer l'ASN le 25 février dernier, après que tous les acteurs
nous ont traités d'affabulateurs ! Aujourd'hui nous demandons l'arrêt du
chantier de démolition engagé en catimini par Placo, qui n'a même pas attendu
l'avis de l'ASN sur son protocole ! »
En première ligne de la manifestation, la sénatrice (EELV) de
Seine-Saint-Denis, Aline Archimbaud, a rappelé son engagement à organiser une
réunion de travail avec la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, avant l'été.
Mais elle a surtout demandé un moratoire et « l'arrêt de la démolition
avant que des études indépendantes soient réalisées sur l'ensemble du site
».
Le candidat aux européennes et ex-secrétaire national EELV, Pascal Durand,
s'est, de son côté, engagé à aider à « faire stopper la démolition devant
les tribunaux ». « La logique de Placo est celle du fait accompli, alors
que l'on sait maintenant officiellement que le site est pollué, c'est
indécent ! ».
Présent hier, le maire (DVD) de Courtry, Xavier Vanderbise, également
vice-président de Marne et Chantereine, propriétaire d'une partie du fort, a
assuré « qu'aucuns travaux ne seraient engagés par la communauté de
communes avant que des études soient faites ! » « Je me suis rendu
sur le chantier et les conditions de travail ne m'ont pas satisfait. Je vais
demander au plus vite un rapport de l'inspection ! », a déclaré l'élu
après avoir appelé à une éventuelle nouvelle mobilisation. « Il faudra se
rendre à la préfecture et chez Placo en semaine pour faire barrage ! »
A ses côtés, dans le cortège, Grégory Jurado, conseiller municipal
d'opposition Front de gauche, a demandé au maire de Courtry « de faire
stopper la démolition par tous les moyens, notamment en utilisant son pouvoir
de police ». Une solution qui était sur toutes les lèvres dans les rangs des
manifestants.
Des « espions » dans les rangs
Si le ton de la manifestation était plutôt calme samedi, un épisode a montré
que les manifestants pouvaient aussi montrer les dents. Eric Flamant, chargé de
mission pour Placo, faisait partie du cortège. En « civil », c'est-à-dire
sans le costume qu'il porte habituellement, celui qui est présenté comme un
consultant par BPB Placo s'est fait huer par les manifestants qui l'ont accusé
d'être « un espion infiltré », avant d'être obligé de quitter la
manifestation. Certains ont même affirmé l'avoir vu « renseigner la police
en donnant les noms des meneurs de la manifestation ». « Il a osé dire que
les travaux de démolition n'entraîneraient pas l'exploitation de la
carrière ! », a déclaré Didier Delperoux, d'EELV 93.

Sur Internet circule une vidéo qui montre Eric Flamant lors d'une réunion
d'information chez un membre de l'opposition à Vaujours (Seine-Saint-Denis),
José Da Silva. Il y déclarait alors en 2012 : « S'il y a un risque,
ce sont nos ouvriers qui le prendront ! » Une sortie qui n'avait, à
l'époque, pas échappé aux militants. D'autres intrus ont été aperçus durant la
manifestation, écoutant les conversations et les entretiens privés des
journalistes.
A l'issue du mouvement, Placoplatre a diffusé un communiqué assurant que
« le projet d'exploitation est à un stade d'études jusqu'à fin 2015, qu'il
sera soumis à autorisation préfectorale sur tous ses aspects : techniques,
environnementaux et sanitaires ». Le géant du plâtre s'est également réjoui de
l'éventualité d'une prochaine concertation constructive avec Ségolène
Royal.
Marion Kremp | 19 mai 2014, 07h00